Abstract Historians generally account for the dynamics of asset accumulation and the concentration of wealth in early modern societies by invoking systems of inheritance, matrimonial strategies, political distribution, and market transfers of property. Thomas Piketty emphasizes a more significant factor: higher returns on inherited capital. This article considers the ways in which early modern history might make use of such a hypothesis.
RésuméPour rendre compte des dynamiques d'accumulation patrimoniale et de concentration extrême des richesses dans les sociétés d'Ancien Régime, les historiens privilégient des facteurs tels que les systèmes d'héritage, les stratégies matrimoniales, la distribution politique et les transferts marchands des biens. DansLe capital au XXIesiècle, Thomas Piketty met en avant un facteur plus déterminant, celui des rendements supérieurs de ce capital hérité. Cet article explore les voies par lesquelles les analyses d'histoire moderne pourraient s'ouvrir à une telle hypothèse.
RésuméLe risque économique qui affecte les rentes constituées à l'instar des autres formes de crédit à l'époque moderne est envisagé par le biais de son impact sur la circulation des titres de rentes émises par l'Hôtel de Ville de Paris au XVIIe siècle. Cette circulation, longtemps supposée marginale, a été négligée par des études qui livrent avant tout des sociologies statiques des rentiers. La rente est au contraire au centre de ce travail. L'objectif est de comprendre ce qui fonde la sécurité du placement rentier et la manière dont ses acquéreurs se garantissent contre l'incertitude qui entrave la possibilité de la transmettre ou de la céder. Cette fiabilité de la rente est analysée à trois niveaux : celui du statut juridique général de la rente ; celui des répercussions du risque sur les cessions et les transmissions des titres et, enfin, dans le détail des actes de transport des rentes.
Changements de partis et opportunisme durant la Fronde (1648-1653) La mort de la politique ancienne ? Katia Béguin Les mémoires et autres témoignages désenchantés écrits après la Fronde (1648-1653), ont dénoncé le déclin de la fidélité, de la moralité, et le triomphe des intérêts individuels, brutalement mis au jour par la guerre civile. Il s'agit au contraire de montrer combien les liens éphémères, les comportements opportunistes sont d'emblée exploités par les rebelles ou par la Cour et participent de la dynamique politique frondeuse.
Résumé La prise du pouvoir de Louis XIV, en 1661, est habituellement considérée comme le prélude à la mise au pas de l'aristocratie. En fait, le règne a largement restauré une stabilité perdue par les grandes familles pendant l'administration de Richelieu et de Mazarin. Louis XIV s'est montré soucieux de réguler la distribution des gouvernements de provinces et des offices de la Couronne. Il a ainsi consolidé, et non anéanti, la domination sociale et la prééminence politique de la haute noblesse. C'est en ce sens que 1661 inaugure véritablement une rupture et le début de relations pacifiées qui expliquent la disparition des soulèvements aristocratiques importants.
Les marchés aux enchères des biens immeubles sont une institution répandue mais encore assez mal connue de l'Europe moderne, par rapport au marché de gré à gré, devant notaires, qui concentre la majorité des ventes. Par rapport à celles-ci, les ventes aux enchères sont conçues et aménagées comme un mécanisme imaginé pour produire le prix le plus élevé possible pour un bien. Pourtant, dans la France des XVII e et XVIII e siècles, les adjudications aux enchères de biens immeubles (réels comme les maisons ou fictifs comme les rentes), au moyen de procédures volontaires ou forcées, aboutissent à des prix nettement inférieurs à ceux issus des transactions de gré à gré. Cet article explique ce phénomène par le coût, la durée de la procédure et son issue très incertaine, ce qui contribue à la modération des offres des enchérisseurs, qui déduisent ex ante les frais élevés liés à la vente, quand ils ne se détournent pas de ce type de marché. De plus, le système des ventes aux enchères, organisé pour offrir les conditions optimales de publicité et de concurrence, est aussi traversé par des droits des familles sur les biens saisis et vendus qui peuvent entraver ou annuler les transferts de propriété, même a posteriori.
La course à l'abime financier de la monarchie française d'Ancien Régime, qui s'est soldée par la convocation des États Généraux de 1789, en raison de la dérobade finale des prêteurs convaincus de l'imminence du défaut souverain, est un objet d'interrogations déjà ancien. La fin de cette histoire a puissamment influé sur la manière de l'interpréter, du fait de la propension des révolutionnaires à stigmatiser " l'imbécilité de [l'] ancien gouvernement ". Elle l'a été aussi à cause du parallèle qui s'est imposé d'emblée avec l'Angleterre rivale, opposée à la France dans toutes les guerres depuis le dernier quart du XVIIe siècle et qui l'a défaite sur les mers comme sur le terrain de la solidité financière. Un point central des controverses est la bifurcation qui a conduit la France à tourner le dos à l'instrument d'emprunt le moins coûteux, la rente perpétuelle, dont elle s'était dotée dès 1522 avec la création des rentes sur l'Hôtel de Ville, pour aller vers les rentes viagères qui ont entraîné les finances de la monarchie vers l'impasse au dix-huitième siècle. On montre comment, en amont de la faillite de Law qui fait écran à la compréhension du temps long, les problèmes financiers du siècle des Lumières étaient déterminés par l'expérience du Grand Siècle.